Comment la promotion d’une approche participative par Unia contribue-t-elle à favoriser l'égalité, à lutter contre la discrimination, et quels sont les défis anticipés pour la prochaine législative dans cette perspective?
Les discriminations, particulièrement les discriminations indirectes et structurelles, ne sont pas souvent visibles et reconnues. Les publics potentiellement victimes de ces discriminations (et leurs organes représentatifs) sont les plus à même de nous alerter, voire de nous suggérer des solutions pour faire cesser ces discriminations. Qui a pensé dans la période de crise sanitaire que les jeunes des quartiers urbains et des logements sans espace suffisant n’allaient pas pouvoir respecter les mesures de confinement imposées ? Qui a pensé que le masque ne pouvait pas être porté par certaines personnes handicapées ? Ainsi, une des premières recommandations d’Unia a été de consulter dès le début – qu’il s’agisse de prendre une mesure ou d’élaborer un texte de loi – les publics les plus vulnérables qui pourraient être désavantagés d’une manière disproportionnée. Cela étant dit, pendant la crise sanitaire, une taskforce fédérale avait été mise en place afin de relayer auprès du Centre de crise les préoccupations des groupes les plus vulnérables.
Unia encourage les autorités à consulter le<s personnes potentiellement discriminées à travers leurs organes représentatifs : les associations et coupoles d’associations ainsi que les organes consultatifs existants. Unia a poussé pour la création de conseils consultatifs des personnes handicapées dans chaque région et communauté. C’est chose faite à l’heure actuelle). De même, certains conseils consultatifs se créent dans le cadre des plans contre le racisme. Unia a dû parfois insister pour que les personnes concernées y soient correctement et suffisamment représentées.
La consultation doit être correctement organisée dans un temps politique parfois serré. Une consultation dans des délais trop courts limite celle-ci, voire l’empêche. Une chose est de consulter, une autre est de suivre, ne fut-ce que partiellement, les avis, suggestions ou recommandations de ces organes. Enfin, pour que ces organes puissent fonctionner correctement, ils doivent pouvoir compter sur des moyens humains et financiers suffisants. De leur côté, ils doivent pouvoir répondre à des exigences de représentativité et de démocratie interne et pouvoir se renouveler régulièrement afin d’accueillir en leur sein des mouvements émergeants.
Concernant le fonctionnement même de notre institution, Unia a de nombreuses conventions de collaboration avec la société civile et fonctionne tout au long de l’année avec deux commissions d’accompagnement Handicap et Racisme. Elles se composent des associations représentatives, des académiques et des partenaires sociaux.
Quelle évolution avez-vous observée quant au taux de plaintes et signalements de discriminations, par exemple le non-recours ou le non-accès aux droits, de la part des publics sans-abri envers les services au cours de la dernière législature fédérale belge (2019-2024), et quels sont vos constats sur le cumul de discriminations que peuvent expérimenter les personnes sans-abri, incluant les multiples formes de discriminations répertoriées par Unia, telles que celles liées à la scolarité, à l'accès aux soins, aux services publics, etc. ?
Pour les deux questions, il s’agit d’un public difficile d’accès pour Unia. Nous recevons très peu de signalements. Un travail est mené en interne pour mettre en place des partenariats avec des associations de terrain rencontrant ce public, afin notamment de pouvoir nous relayer les situations problématiques et nous sensibiliser à leurs particularités et besoins. Le nombre de signalements reçus à Unia n’est cependant pas révélateur de la problématique pour une question d’accessibilité, qu’Unia met une priorité à régler.
Unia intervient face au public sans abri à deux niveaux :
- Les discriminations qui ne permettent pas à ce public d’avoir accès à un service. Il s’agit principalement du logement, mais aussi de l’horeca, etc. Ces discriminations empêchent les personnes de sortir du sans-chez-soirisme.
- Les discriminations qui plongent une personne dans une situation de sans-chez-soirisme, comme les expulsions.
Unia a posé certains constats :
- Nous recevons un certain nombre de signalements de la part de femmes – souvent avec enfants – habitant chez un « ami », moyennant services divers. Un travail est en cours au niveau de l’intersectionnalité.
- Nous constatons une vulnérabilité importante des personnes expulsées. Unia a rendu sur ce point un avis à la Région de Bruxelles capitale sur les expulsions et le projet d’ordonnance récent sur la matière.
- Nous n’avons pas de dossiers individuels concernant le refus de candidats locataires sans abri par un propriétaire, mais un ressenti en ce sens est partagé par les associations de terrain.
- Unia s’implique dans le travail relatif au tarif social énergie qui, ne s’applique pas aux structures d’hébergement des personnes sans-abri : Tarif social énergie au regard de la législation antidiscrimination (2023) | Unia.
Le non-recours aux droits s’applique aussi à Unia ?
Ce public ne vient pas chez nous, c’est via les associations de terrain que nous y avons accès
En revanche, soulignons une évolution législative très importante : le critère de la condition sociale qui est intégré dans les différentes législations et qui protège les personnes sans abri/sans chez soi/ les Immenses en tant que telles
Un grand merci à Unia, et en particulier à Anne Salmon, pour sa participation à cette interview. Ses insights précieux ajoutent une dimension enrichissante à la discussion sur l'approche participative et la manière dont nous pouvons l'intégrer pour mieux lutter contre le sans-chez-soirisme en Région Bruxelles-Capitale.